Produire bio, oui, …
Actualité - 17/01/2017
En décembre dernier, dans le cadre de la loi Égalité et Citoyenneté, le Parlement a adopté un nouvel amendement prévoyant l’introduction dans les menus des collectivités territoriales et des établissements publics de 40 % d’aliments durables (de saison, en circuits courts, etc.) dont 20 % issus de l’agriculture biologique d’ici à 2020. Le signe d’une tendance plus profonde sur le territoire français.
Les produits bio en forte demande
Cet amendement concernant les cantines scolaires, mais aussi les restaurants d’entreprise ou les maisons de retraite, vient conforter l’avis des Français concernant l’alimentation bio. Un sondage Ifop commandé par l’association Agir pour l’environnement révèle que 76 % des Français se disent favorables à l’introduction d’aliments bio, locaux et de saison dans la restauration collective.
Pour l’heure, on en est encore loin, car moins de 4 % des aliments servis en restauration scolaire sont issus de l’agriculture biologique. Cependant, selon l’ONG Générations Futures, l’adoption de ce seuil de 20 % constituera un « bon levier de développement de l’agriculture biologique sur tout le territoire et permettra de tendre vers les objectifs inscrits dans le Grenelle de l’environnement ». Selon Générations Futures, « si l’agriculture biologique se développe ces dernières années (+ 23 % de terres bio en 2015), la France est encore loin des objectifs fixés en 2007 avec seulement 5,8 % de sa SAU (surface agricole utile) en bio en 2015 ».
Ce ne sont pas les Français qui diront le contraire. Selon l’Agence Bio, ce mode de production plus respectueux de la nature et de l’environnement séduit de plus en plus les consommateurs et, plus largement, les citoyens. En 2015, 9 Français sur 10 (89 %) déclaraient en consommer, même occasionnellement, contre seulement 54 % en 2003.
Si la consommation d’aliments bio était ainsi estimée à 5,76 milliards d’euros en 2015, l’Agence Bio table sur une augmentation de 20 % en 2016, soit 6,9 milliards d’euros. Cette progression, qui concerne tous les produits alimentaires, touche particulièrement les produits frais (fruits et légumes, crèmerie, viandes) qui détiennent près de la moitié des ventes en valeurs de produits bio.
Qu’en est-il en amont, chez les producteurs ?
Courant 2016, on comptait 31 880 producteurs bio, soit 10 % de plus qu’en 2015. Ils occupaient fin 2016, plus d’1,5 million d’hectares de SAU en France. Si cela peut encore paraître peu, la tendance est à l’augmentation, voire à l’explosion. En témoignent les exploitations passées en bio, qui ont aboli l’usage de pesticides et engrais chimiques pour acquérir le statut de producteur biologique. En 2015, plus de 220 000 hectares de SAU sont ainsi passés en conversion, soit trois fois plus qu’en 2014. Et le phénomène progresse.
Stéphanie Pageot, présidente de la fédération nationale de l’agriculture biologique (FNAB), constatait ainsi dès début 2016, « une nouvelle vague de conversions au bio depuis six mois sur tout le territoire ». Pourtant, la production française biologique demeure encore déficitaire par rapport à la demande : « 76 % des produits bios consommés en France ont été produits dans l’Hexagone, contre 72 % en 2014 », souligne ainsi Florent Guhl, directeur de l’Agence Bio.
Plus de demande mais moins d’aides à la production
Alors, face à cette croissance spectaculaire de l’agriculture biologique entre 2015 et 2016, la satisfaction des producteurs devrait être perceptible. Pourtant, en décembre dernier, ils manifestaient. Entre autres causes, le système des aides à l’agriculture biologique. En effet, de nombreux retards de paiements des aides de l’État, certains datant de 2015 et venant s’ajouter à ceux de 2016, entraînent pour nombre d’agriculteurs une situation financière difficile, voire critique pour certains.
Or, pour les exploitations en conversion, « ces aides sont indispensables pour soutenir l’exploitation dans la phase d’adaptation de son système au mode de production biologique », expliquaient en décembre le réseau Bio Bourgogne et les Groupements des AgroBiologistes départementaux (GAB). Ils expliquaient ainsi que « les deux premières années, l’agriculteur ne peut pas commercialiser ses produits dans les circuits de l’agriculture biologique. Par conséquent, il ne bénéficie pas de la plus-value du label AB alors même que l’adaptation de son système engendre des baisses de rendements. »
Ces agriculteurs peuvent bénéficier le temps de la conversion (trois ans) d’un accompagnement technique et financier, financé par Bruxelles (à hauteur de 75 %) et par l’État français (à hauteur de 25 %). Seulement, face à l’afflux des demandes de conversion, le montant des aides promises augmente fortement et la France peine à dégager les fonds nécessaires.
En réponse à ces difficultés, le ministre de l’Agriculture Stéphane Le Foll a, depuis, annoncé la revalorisation de l’avance de trésorerie en attendant le paiement du solde de ces aides, et en attendant une revalorisation de plus grande ampleur des fonds destinés à l’agriculture biologique en France.